Aussi appelée "les bonnes pratiques en laboratoire" assurant la
crédibilité et la robustesse des résultats, la démarche qualité en
laboratoire peut se résumer de façon pertinente par "Plan -
Do - Check - Act", abrégé dans la suite par PDCA ; "plan" pour établir un plan détaillé
des expériences à entreprendre (plan scientifique), établir les protocoles
d'expérimentation dans les règles de sécurité* et les normes en optimisant
l'efficacité (plan organisationnel) ; "do" pour faire les expériences en
suivant scrupuleusement les protocoles établis et en notant scrupuleusement
ce qui a été fait (cahier de laboratoire : traçabilité, reproductibilité,
aspects juridiques) ; "check" pour supervision, audit et vérification des
résultats/formulations obtenus, vérification du matériel
employé, etc...
(contrôle) ; "act" pour entreprendre des actions correctives, rechercher
des améliorations, rechercher des failles éventuelles, etc... (actions
préventives).
Etant donné que, dans le contexte de travail en laboratoire (R&D), la
démarche qualité se vit au quotidien, les enseignements de formulation ont
notamment mis l'accent sur une approche intégrée de la qualité au sein des
travaux pratiques "formulation - tronc commun" et "milieux
dispersés - optionnel".
Dans le contexte de la formulation, les cours intègrent la démarche qualité
dans la mesure où cela se justifie (exemple : un cours plutôt théorique sur
des phénomènes de physico-chimie n'a pas de raison de faire appel à la
qualité). Dans le cours relatif aux techniques de caractérisation des
milieux dispersés, les étudiants sont formés de façon intégrale à la
technique elle-même et aux problèmes associés à la mesure (artéfacts,
impacts de mauvais échantillons ou de mauvais réglages d'appareillage sur
les résultats, etc...). Les cours plus portés sur des produits finis
évoquent explicitement les problèmes liés aux lots, à l'origine des
matières premières (exemple : variation saisonnière des produits d'origine
naturelle), aux protocoles, etc... et la nécessité d'un travail scientifique
et expérimental rigoureux pour aboutir à la formulation des systèmes
complexes (plan, check, act ; "do" n'étant pas directement accessible en
cours magistral). Le cours "gestion des risques" en option EI3 (risk
assessment) a comme but d'intégrer la gestion des risques, de la sécurité
et de la qualité comme bases pour une science valable.
* La sécurité au laboratoire est tellement évidente et obligatoire dans les
travaux pratiques qu'elle n'est pas précisée dans ce document.
Hormis le sujet général touchant à la formulation, la particularité de ces travaux
pratiques se trouve dans leur organisation. Bien que les étudiants
changent leur sujet de projet chaque fois qu'ils viennent en travaux
pratiques, ils sont désignés responsables de l'un des projets. Ceci
signifie qu'ils ont à assurer le suivi et le développement de leur projet
même lorsqu'ils travaillent sur un autre problème. Les bénéfices de cette
organisation un peu compliquée sont multiples. Ils sont entraînés à tenir
des cahiers de laboratoire permettant le passage des informations. En
plus, ils rencontrent pour la première fois la tâche complexe de diriger
les travaux d'un tiers. Enfin, chaque projet se déroule sur 6 jours,
plutôt que les 8 heures standard, ce qui donne aux étudiants une meilleure
idée des aspects pratiques de la formulation. Les travaux pratiques se
terminent avec une présentation de chaque projet devant tous les
étudiants.
Les notions de PDCA de la qualité plus précisément abordées (et assistées à
toutes les étapes par les encadrants) et vécues en travaux pratiques tronc
commun sont : (1) Plan - les chefs de projet planifient et organisent les
expériences, établissent les protocoles expérimentaux ;
(2) Do - à part
pour l'aspect intrinsèque des travaux pratiques, la qualité intervient sur
ce point par la tenue d'un cahier de laboratoire obligatoire qui s'effectue
pendant les expériences (pas de rédaction post journée de travaux
pratiques). Ces cahiers sont contrôlés et tout manquement à la précision
et à l'exactitude indiqué par les encadrants des travaux pratiques. Par le
fait qu'un cahier de laboratoire est rattaché à un projet et circule entre
différents utilisateurs, les difficultés liées au passage des informations
pertinentes sont vécues au quotidien par les élèves ;
(3) Check - tout
projet doit se focaliser sur la répétabilité et la reproductibilité des
résultats/formulations et les chefs de projets sont en effet amenés
intrinsèquement à s'y attacher. Par l'organisation de ces travaux
pratiques, des exécutants multiples interviennent dans un même projet,
conduisant à une multiplication des erreurs possibles qui ne se révèlent
aux chefs de projet qu'en intégrant la notion "check" ; (4) Act - les
actions correctives récurrentes sont entreprises "par nécessité" par les
chefs de projet. De par la conception des travaux pratiques (il n'y a aucun
protocole fourni et les exécutants sont nombreux), l'absence d'actions
correctives mais aussi préventives est extrêmement préjudiciable à un
avancement raisonnable. Vers la fin même du projet, il n'est
d'ailleurs pas rare de voir des chefs de projet "recommencer (presque) à
zéro", en choisissant une démarche qualité "de dernière minute" très
efficace et qui compense les problèmes vécus pendant les journées
précédentes. Notre constat est que l'apprentissage "par l'erreur"
sensibilise fortement les élèves.
Ce module de travaux pratiques est optionnel et a lieu après "Formulation
tronc commun". Les étudiants travaillent pendant 5 jours consécutifs sur
un seul projet qui est bien plus complexe que ceux traités en
"Formulation - tronc commun" et qui porte sur un produit formulé fini (shampoing, gel
dermique, lessive, ...) ou sa faisabilité (formulation d'un complément
nutritif, formulation d'un antibiotique dentaire, enzyme dans les
lessives, ...).
Les notions de PDCA de la qualité abordées (et assistées à toutes les
étapes par les encadrants) et vécues en travaux pratiques optionnels sont
les mêmes qu'en travaux pratiques tronc commun (Plan : absence de protocole
initial, etc... Do : cahier de laboratoire, etc... Check : répétabilité et
reproductibilité et tests, etc... Act : pas d'aboutissement possible sans
actions correctives et préventives).
En complément aux notions de la démarche qualité enseignées également en
travaux pratiques tronc commun s'ajoutent plus précisément : la prise en
compte du cahier des charges, le formalisme dans les protocoles et la
traçabilité, l'audit journalier (debriefing). En début du projet, les
élèves reçoivent le cahier des charges concernant leur produit à formuler
ainsi qu'une liste des produits chimiques et des équipements disponibles
(et du personnel à contacter pour une introduction à leur utilisation) dans
l'ensemble du laboratoire. L'absence d'informations plus détaillées
renforce tout particulièrement les points "Plan" et "Act", mais aussi la
partie "Check" par rapport à la conformité du produit avec le cahier des
charges. A part pour l'aspect cahier de laboratoire, les élèves sont
confrontés à la rédaction formalisée de fiches de préparation et de
caractérisation associées à chaque préparation ("Do"). Cette "paperasse"
très détaillée (numéro de série, précisions concernant le lot, le matériel
et l'équipement utilisés, précision concernant le mode opératoire sur
chaque fiche, identification des risques et des mesures de sécurité sur
chaque produit/étape de la formulation ainsi que la préparation finie) est
initialement vécue comme trop lourde par les étudiants. L'avantage de ce
"forcing" se révèle avec ces projets relativement longs (5 jours entiers et
consécutifs) où il n'est pas exceptionnel d'arriver à une centaine de
préparations par projet. De par cette quantité des préparations réalisées,
les étudiants constatent très vite l'importance de la traçabilité
(qu'est-ce qui a été fait, quand, avec quoi, comment, pourquoi, etc...). Un
exemple vécu couramment par les élèves est que ce formalisme exigeant leur
permet notamment de remonter, à partir de problèmes constatés sur une
formulation finie ("Check"), à une préparation "fautive" d'un pré-mix et
d'entreprendre des mesures correctives et préventives pour la suite
("Act"). Qu'à la fin des 5 jours des projets, tous les élèves soient
intimement convaincus de l'avantage d'une démarche qualité rigoureuse est
donc tout à fait naturel. L'audit journalier (debriefing) avec l'ensemble
des élèves renforce les aspects supervision, contrôle et planifications.
La participation globale de l'ensemble du groupe met en avant l'aspect
travail en groupe et l'écoute attentive des suggestions ou interrogations
des autres. Guidés et encadrés par l'enseignant-chercheur qui prend le
rôle de "responsable du labo R&D", ces audits encouragent les
collaborations spontanées entre équipes, renforcent la compréhension des
bonnes pratiques au laboratoire et mettent en évidence les conséquences
bénéfiques de la démarche qualité pour la crédibilité et la robustesse des
résultats obtenus.
Ce cours a lieu en option E.I.3 MiDiFAB et il s'agit d'une ébauche de la
gestion des risques dans un laboratoire R&D dans lequel certains aspects
d'une démarche qualité sont abordés inévitablement (les bonnes pratiques de
laboratoire !). La sécurité en laboratoire étant d'ores et déjà abordée en
tronc commun, le but de ce cours est essentiellement de sensibiliser nos
futurs ingénieurs à la gestion des risques et de les préparer aux
responsabilités d'un cadre dans un laboratoire.
Le cours se base sur une approche intégrale : à partir de la composition et
de la forme physique (liposome, émulsion, phase lamellaire, gel, etc...) d'un
produit fini de formulation liquide, il s'agit de définir les protocoles
expérimentaux d'une préparation R&D, en identifiant les risques potentiels,
puis en gérant la sécurité au sein des protocoles (classifications des
risques en fonction du personnel manipulateur), tout en cherchant des
solutions efficaces (équipement, espace de travail, niveau organisationnel
et de qualité). Les présentations par l'enseignant sont focalisées sur la
reconnaissance des risques et la gestion intégrée dans les protocoles
expérimentaux en démontrant également comment les manquements à la sécurité
ne nuisent pas seulement à la santé, mais souvent aussi à la science
(sécurité et qualité ne doivent pas être aperçues comme lourdes, mais comme
des prérequis pour une science de qualité). Les intermèdes "remu-méninges"
(brain storming, travail en groupe) sont mis à profit pour identifier les
risques/problèmes, trouver des solutions efficaces, renforcer l'aspect de
travail en groupe qui est essentiel dans la gestion des risques. Le cours
et les discussions se déroulent en anglais avec pour objectif une
consolidation des capacités de nos étudiants à l'utilisation de l'anglais
comme langue de travail.